- COMMUNES POPULAIRES
- COMMUNES POPULAIRESCOMMUNES POPULAIRESLa révolution chinoise s’est attachée très tôt à résoudre le problème primordial de la réforme agraire en adoptant des solutions pragmatiques et originales.Après les expériences collectivistes ponctuelles réalisées en «zones libérées» durant la guerre civile, quatre années, dites de transition (de 1949 à 1952), marquent la préparation de la collectivisation économique. En 1953, après la distribution aux paysans pauvres des terres des grands propriétaires fonciers dépossédés, les autorités de Pékin transforment les équipes d’entraide saisonnières en équipes d’entraide permanentes, au sein desquelles la propriété privée reste encore acquise. Qualifiées de «semi-socialistes», les coopératives agricoles de production, étape suivante de cette transformation économique (décembre 1953), regroupent les anciennes équipes d’entraide et marquent un tournant: les terres passent entre les mains de collectivités qui les gèrent et les travaillent. Limité et prudent à ses débuts, le processus se précipite et les coopératives «socialistes» se multiplient en 1957.Le développement de l’économie chinoise conduit les experts de Pékin à procéder, en avril 1958, à l’établissement de communes populaires, que des paysans de l’île Mayi et du Henan avaient préconisées. Cette dernière expérience de collectivisme coïncide avec le mouvement du «grand bond en avant» et répond aux besoins de l’économie chinoise: rentabilité améliorée par l’agrandissement des unités de production; efficacité renforcée par la planification sur une large échelle; claire définition des motivations et des objectifs; mobilisation des masses paysannes.La mobilisation des énergies permet d’utiliser une main-d’œuvre jusqu’alors sous-employée: femmes libérées des tâches ménagères grâce à l’implantation de crèches, de jardins d’enfants, de blanchisseries et autres services; commerçants libérés du fait de la disparition de leur négoce; étudiants et scolaires en vacances. Personnes âgées et employés disponibles contribuent, ne serait-ce qu’à temps partiel, à la production, tandis que l’artisanat, encouragé durant la morte-saison agricole, permet aux individus et aux collectivités d’amasser des revenus supplémentaires. Les structures des communes populaires s’établissent ainsi dès 1958: à la base, l’équipe de production (sheng chan dui ) est le plus souvent constituée à partir de l’ancienne coopérative; l’unité est un hameau, ou un village, de 100 ou 200 villageois (parfois davantage), disposant de 200 à 600 mu de terres arables (1 mu = 1/15 ha), soit quelque 15 à 50 hectares; au-dessus de l’équipe de base se trouve la grande équipe de production (sheng chan da dui ), nommée brigade de production en Occident, de 800 à 1 000 villageois; une dizaine d’équipes cultivent environ 2 000 mu, soit près de 150 hectares. Vient enfin la commune populaire elle-même (renmin gongshe ), qui est en fait un regroupement de villages abritant quelque 5 000 familles.L’établissement des communes populaires vise à mettre en pratique deux mots d’ordre économiques aussi spectaculaires que prématurés: le «grand bond en avant» et la «marche sur les deux jambes» (agriculture et industrie). En conséquence, les communes populaires, qui doivent constituer sinon un raccourci, du moins une formule pour un passage accéléré vers le communisme, se mettent fièvreusement à fabriquer plus d’un million de «petits hauts-fourneaux». On cherche à atteindre le niveau industriel.Après une période d’enthousiasme, l’échec est reconnu en 1960. Intervient alors un «réajustement» (1961). Les communes populaires voient d’abord leurs superficies réduites (aussi leur nombre passe-t-il de 26 000 à 74 000), et la brigade (de 15 à 20 par commune) devient la cellule de base, elle-même subdivisée en une dizaine d’équipes. La commune populaire regroupe entre 7 000 et 8 000 paysans, en moyenne, mais les disparités sont grandes. En second lieu, des réformes de structures modifient les communes populaires dont les attributions administratives et politiques coïncident avec l’unité territoriale du village (xiang ), lequel comporte ses assemblées et ses comités responsables de l’application des directives du parti et du gouvernement. Les attributions économiques des communes leur assurent l’autonomie d’une entreprise (répartition du travail, des ventes et des crédits, gestion des stocks, organisation des transports et des plans locaux de construction); leur sont aussi demandés certains travaux d’intérêt général (électrification, barrages, épandages, plantages ou creusements de canaux). Les activités sociales des communes comprennent l’éducation, la santé et la culture. Enfin, et ce n’est pas le moins important, les communes populaires se voient confier l’organisation et l’entraînement de la milice. Le dernier volet du réajustement est l’incorporation aux communes populaires d’un petit secteur privé sous la forme de lopins concédés aux particuliers (7 p. 100 des terres cultivables au maximum).Les revenus des communes populaires sont passibles d’impôts (le plus souvent en nature et représentant un forfait de 7 à 8 p. 100); plus de 50 p. 100 de ces revenus, distribués sous forme de salaires (dont l’éventail est très réduit), sont affectés aux dépenses courantes et aux investissements financés par fonds d’accumulation, variable avec la production. À la différence des unités productives de l’industrie soumises aux directives du Plan, les communes populaires décident elles-mêmes de leurs investissements, mais en tenant compte des directives étatiques. À partir de la révolution culturelle prolétarienne, un effort a été consenti pour généraliser les «cinq garanties de base» pour chaque membre d’une commune; ces garanties représentent une sorte de minimum vital (alimentation céréalière; combustible; vêtement; habitat, le plus souvent privé; dépenses funéraires).Cette organisation va disparaître au début des années 1980, dans le mouvement de la politique de réforme engagée par Deng Xiaoping à la suite du IIIe plénum du XIe comité central du Parti communiste chinois de 1978. L’unité administrative de base redevient le Xiang, et une décollectivisation de fait se généralise dans les campagnes.
Encyclopédie Universelle. 2012.